Classer des neurones pour mieux comprendre la maladie de Stephen Hawking
Comprendre les maladies neurodégénératives représente un défi constant pour la recherche et la médecine. Parmi ces pathologies, il y a notamment la sclérose latérale amyotrophique (SLA), maladie dont souffrait le célèbre physicien Stephen Hawking. Cette pathologie se caractérise par la mort progressive des neurones dits moteurs qui contrôlent les muscles, entraînant une paralysie. Comprendre le ou les processus responsables de la mort de ces neurones repose sur l’étude de milliers de paramètres qui ensemble définissent le statut sain ou malade d’une cellule. Dans ce contexte l’intelligence artificielle est un outil puissant qui permet de rapidement mettre en lumière des processus biologiques par l’analyse simultanée de milliers de mesures impossibles à effectuer par un être humain.
Une base de données de plus de 150'000 images
Pour comprendre ce qui arrive aux neurones, il faut des données, beaucoup de données. Rickie Patani et Jasmine Harley de l’institut Francis Crick à Londres, spécialisé dans les recherches dans le domaine médical, ont constitué une base de données unique, riche plus de 150'000 images de neurones moteurs. Ces images ont été réalisées grâce à la microscopie à fluorescence. Grâce à un jeu de couleur, cette technique permet de distinguer les différentes parties des neurones, comme le noyau et les dendrites. Les cellules ont également été soumises à différentes conditions de stress, par exemple en provoquant un choc thermique. En effet, il a déjà été prouvé que dans certaines conditions de stress, une cellule saine peut ressembler à une cellule affectée par la SLA.
Classer de façon intelligente pour reconnaître les neurones atteints
Cette base de données a servi à mettre en place un modèle développé à l’Idiap et utilisant l’intelligence artificielle basée sur la technique dite du deep learning. Ce modèle permet de distinguer si un neurone moteur est atteint ou non, grâce à l’analyse des facteurs liés aux différentes parties de la cellule. « Pour que ce soit efficace, il faut également qu’il y ait assez d’informations différentes dans le set d’images fourni, » détaille Colombine Verzat, ingénieure en développement à l’Idiap et co-autrice de cette publication.
Contrairement aux méthodes utilisées précédemment, ce nouveau modèle permet d’analyser directement les images pixel par pixel, sans devoir se concentrer sur une partie de la cellule ou ne retenir qu’une caractéristique précise, ce qui rend au final la méthode non biaisée. « Les outils qu’offre l’intelligence artificielle sont passionnants puisqu’ils permettent d'appréhender des masses de données considérables et d’en extraire des informations clés, des tâches qui surpassent le cerveau humain, » explique Raphaëlle Luisier, responsable du groupe de recherche Génomique et informatique de la santé.
Guider les futures recherches
L’idée est de tirer parti de la puissance de grandes bases de données d’images pour tester rapidement des hypothèses sur le fonctionnement de la maladie. Par exemple, aujourd’hui, les experts qui étudient la SLA savent que ce sont surtout certaines protéines dans la cellule qui sont des indicateurs si un neurone est atteint. Mais cette étude montre qu’une autre partie des neurones moteurs, les neurites, sont également affectées par la SLA. Cela pourrait orienter des recherches plus approfondies sur l’influence de cette structure cellulaire dans la maladie. L’objectif à terme est d’améliorer les connaissances sur cette maladie et de faciliter la découverte d’un traitement, qui n’existe pas à ce jour.
Plus d’informations
- Groupe Genomics & Health Informatics